GARANCE
BUTLER-OLIVA
Par le travail de l’installation, de l’espace et de la sculpture, Garance Butler-Oliva s’intéresse à la patience et la lenteur, en proposant des formes dont l’expérience se vit à contre-courant de la rapidité et de l’optimisation temporelle sociétale. Comme des mémoriaux gardant le souvenir d’une temporalité de plus en plus inaccessible, sur le point de se perdre.
Elle tente d’atteindre ces temps long par une invitation à la contemplation. Par des formes qui ne se révèlent qu’avec lenteur, parce que lea spectateur.ice s’y dédie. Des installations immersives autour desquelles lea spectateur.ice doit se mouvoir et attendre les variations de lumière nécessaire pour que l’œuvre apparaisse. Des miroirs nécessitant un long temps de contemplation pour que l’oeil s’habitue et que des images se révèlent. Une volonté de réhabituer le corps à la patience, de lui rappeler qu’il est normal que rien ne soit acquis immédiatement.
Cette recherche de lenteur s’approfondie par la transformation des matériaux, tel que la cristallisation du sel, l’oxydation du métal ou encore l’évaporation de l’eau. En plaçant lea spectateur.ice dans une position de patience, iel est amené.e à prendre conscience de l’imperceptible mouvance de la matière et de sa temporalité. De ce fait, il est impossible pour son regard d’entièrement s’approprier l’oeuvre, cette dernière s’affranchissant des rythmes propres de nos corps sociétaux.
Symbole d’un temps qui s’écoule et reflète, l’eau participe à une dichotomie entre des matériaux bruts et des formes organiques, une immobilité et un évolution constante, complexifiée par un jeu d’inter-influence. La fragilité impacte ce qui semble statique, telle que la rouille recouvrant le métal ou l’eau imprégnant le béton. Le liquide vient alors faire office de catalyseur, altérant la matière sans pour autant être altéré. L’apparent système d’opposition se révèle ainsi trompeur, les composants s’inscrivant dans des dynamiques symbiotiques.
Les pièces sont ainsi prises dans un mouvement perpétuel : celui de la matière qui s’égoutte, des réactions chimiques engendrées, ou encore des spectateur.ices qui sont amené.es à se mouvoir parmi elles. Cette inconstance les invite à porter un regard contemplatif, aussi bien sur la chute de la cire dans un bassin de verre, que sur la formation de cristaux à la surface du métal.
Parabole des enjeux mémoriels, cette rencontre des temporalités fait écho à des zones d’antinomies religieuses et politiques que Garance Butler-Oliva tente de questionner. Elevée au sein d’une famille juive israélienne et athée antisionniste, elle s’inspire du silence imposé par l’architecture des mémoriaux de la Shoah dans lesquels elle a passé beaucoup de temps enfant et par le désert du Negev dans lequel elle a grandi.
Texte de Gral.
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